Aujourd'hui, à l'ère anthropocène, les êtres humains sont devenus le facteur déterminant de l'évolution. Selon le chimiste atmosphérique et lauréat du prix Nobel Paul J. Crutzen, l'humanité a été contrainte durant des milliers d'années, de se défendre contre la primauté de la nature, mais cette relation s’est retournée plus tard avec l'avènement de l'industrialisation. Cette exposition présente une génération d'artistes qui, conscients de la façon dont les gens contrôlent et menacent la nature, sont en quête d'alternatives à l'impasse de l'évolution.
Dans leur désir de distiller des essences et de construire des modèles qui peuvent servir de contre-concepts potentiels, ou du moins d'approches pour changer notre façon de penser, les artistes ont fait des voyages jusqu'aux coins les plus reculés de la terre, des territoires naturels jusqu'ici pratiquement inexplorés. Depuis les derniers sanctuaires de la jungle et des profondeurs de l'océan, ils ont conçu des simulations informatisées, des expériences biologiques et des biofictions futuristes. Ils ont chassé le paradoxe d'une nature intacte créée par l'humanité, en mélangeant philosophiquement la pensée critique et animiste avec des éléments tirés des sciences de la vie, de la bio-ingénierie et de la géo-ingénierie. Dans le même temps, les artistes ont utilisé des technologies de pointe pour créer des images et du matériel de montage. Grâce à la réalité virtuelle, l'animation par ordinateur et l'impression 3D, ils ont généré des images qui vont du merveilleusement beau à l’hyperréalisme confus. Les œuvres oscillent entre des scénarios post-apocalyptiques et des écovisions alternatives, entre des représentations poétiquement abstraites et des idées de bricolage tout à fait tangibles. Et bien que les gens ne soient nulle part visibles dans l'exposition, la marque de la construction humaine est reconnaissable dans toutes les œuvres. Quelque chose qui à première vue peut paraître naturel et inaltéré est en réalité toujours littéralement fait par la main de l’homme. Les artistes marchent sur une corde raide entre les visions alternatives et les dynamiques dysfonctionnelles qui se dressent inévitablement lorsque les gens se mêlent irrévocablement de processus naturels. Cela est lié à la critique du concept anthropocentrique et axé sur le profit de la société qui considère la nature comme une ressource à exploiter plutôt qu'une fin en soi. En fin de compte, l'exposition examine la compréhension de l'humanité d'elle-même en tant qu'espèce. Pourtant, dans leur quête de perspectives qui intègrent harmonieusement les développements écologiques et technologiques, les œuvres évoquent le dilemme actuel sur l'avenir, qui fluctue entre d'une part préserver soigneusement la coexistence fragile des hommes et de la nature, et de l’autre les mesures radicales concernant la dynamique apocalyptique. Un équilibre entre les deux pourrait finalement déstabiliser le contrôle humain, créant l'espace pour une ère post-humaniste où la nature et la technologie unissent leurs forces contre l'humanité. Dans ces scénarios spéculatifs sur l'avenir, les dualismes de la nature et de la technologie, du fait et de la fiction, de l'optimisme et du pessimisme ne peuvent être aisément séparés.
Avec des œuvres de Baggenstos / Rudolf et Hackteria, Julian Charrière, David Claerbout, Daiga Grantina, Dominique Koch, Elodie Pong, Daniel Steegmann Mangrané, Monica Studer / Christoph van den Berg, Phillip Zach.
Commissaire d’exposition : Sabine Rusterholz Petko, historienne de l'art et conservatrice indépendante, Zurich
Exposition du 31 mars au 30 juillet 2017. Kunsthalle Mainz, Am Zollhafen 3-5 – 55118 Mainz (Allemagne). Tél. : +49 61 31 12 69 36. Ouverture du mardi au vendredi de 10h à 18h, mercredi de 10h à 21h, samedi et dimanche de 11h à 18h.
