Débat sur la réémergence en 2004 de Spiral Jetty, l’oeuvre de Robert Smithson après 30 ans sous les eaux
















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Archives: Publication vendredi 19 mars 2004.

Toutes traductions des articles et textes en américain par Marika Prévosto. Tous droits réservés


La Spiral Jetty (Jetée en spirale) de Robert Smithson est le résultat du déversement de 7.000 tonnes de pierres basaltiques (noires) et de terre sableuse dans le Grand Lac Salé de l’Utah. Elle a l’apparence d’une élégante volute de 450 mètres de long et 4,5m de large. Malgré l’apparente simplicité de l’oeuvre, le critique d’art Robert Hughes parle à son égard d’ « embouteillage de références symboliques ». Smithson y a également condensé sa colère envers les « robots » de l’establishment artistique new-yorkais, sa fascination pour la dislocation, le décentrement et l’entropie.
























































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Exposition du 7 septembre au 2 novembre 2012. Rio de Janeiro, divers lieux (Brésil).

© ArtCatalyse International / Marika Prévosto 2012. Tous droits réservés


Expositions internationales en cours

Le nom OiR, "Rio" épelé à l'envers, se réfère précisément à l'idée de penser à la ville d'une autre manière. Le projet vise à relancer et rafraîchir la tradition d'appeler le regard d'un étranger sur le paysage de Rio de Janeiro, initiée lorsque les aventuriers et les explorateurs européens des premières expéditions ont amarré leurs bateaux dans la baie pour tenter d'explorer et de traduire les mystères de ce nouveau territoire. Plus récemment, cette tradition a été reprise dans les essais de penseurs illustres tels que l'anthropologue franco-belge Claude Lévi-Strauss et l'écrivain autrichien Stefan Zweig.

Selon Dantas, l'art public a aussi un aspect social important, car « il rassemble les gens de différentes classes sociales autour d'un concept qui leur redonne la faculté d'ouvrir les yeux à la nouveauté et à leur patrimoine propre, tout en créant des espaces uniques, des lieux de réunion et des points de repère dans la ville. »

Les oeuvres réalisées dans la phase initiale du projet sont inspirées par le thème "Le Milieu", qui, selon les mots du conservateur, se concentre sur « l'espace que nous occupons, ce qui nous unit.. »







Archives 2004 - La Spiral Jetty de Robert Smithson

C’est seulement deux ans après sa réalisation en 1970 que la Jetée en spirale disparaît sous plusieurs mètres d’eau saumâtre et vaseuse, lors d’un changement dans l’écoulement capricieux du Grand Lac Salé. Cet effacement de l’oeuvre amplifie la tragédie du décès de son créateur, Robert Smithson, en 1973, lors d’un accident d’avion en survol d’un autre site au Texas, avec sa part de mystère et de légende. Il avait alors 35 ans. L’oeuvre semblait destinée à ne laisser que quelques traces à travers les écrits de Smithson, ses croquis, photographies et les articles parus lors de la création. L’artiste Nancy Holt, femme de Robert Smithson et son exécuteur testamentaire, a fait don de Spiral Jetty en 1999 à la Fondation Dia Arts installée à New York.

Malgré les recherches effectuées, personne n’avait réussi à retrouver au moins son emplacement sur le pourtour du lac immense et désertique. Seuls indices de sa localisation, le journal et le film tourné par l’artiste lors de sa création. Elle a été repérée d’avion et de satellite lors de périodes d’assèchement partiel du lac, mais difficile de retrouver l’endroit exact après recoupements. L’artiste Tacita Dean en a même fait une oeuvre sonore, enregistrant sa dispute avec son compagnon de voyage à propos des indications laissées par Smithson (Trying to Find the Spiral Jetty). La Jetée a réveillé les passions depuis sa réapparition, ponctuellement depuis 1999, puis plus durablement en 2003-2004, quelque trente ans après sa création puis sa submersion.

L’apparence de la Jetée en spirale a maintenant beaucoup changé à cause d’une métamorphose cristalline dûe au dépôt de sel recouvrant désormais le basalte. John Dickie, journaliste à Londres et passionné par le travail de Smithson, décrit sa vision comme « une confiserie tirée d’un gigantesque chariot à desserts ». La spirale d’une blancheur étincelante est en effet baignée, comme à sa création où elle était alors elle-même perçue comme quelque chose de monumental, gris et solennel, dans un liquide ressemblant à un étrange vin rouge. Cette couleur est pourtant naturelle, due à des algues, l’un des rares organismes capables de survivre dans cette partie extrêmement saline du lac.

Cette proportion très élevée de sel est due à la construction d’une voie ferrée fermant la partie nord du lac et retenant donc ces particules en nombre plus considérable encore que dans ses autres périmètres. Dan Brooke, accompagnant en 2002 John Dickie sur le site lors de la première émergence de l’oeuvre, témoigne ainsi : « Le lac semble si salé qu’il projette la sensation puissante que vous ne pouvez le pénétrer : c’est très apaisant ». Robert Smithson n’aurait peut-être pas pu imaginer son aspect actuel, maintenant plus « conventionnellement » esthétique, et de ce fait attractif pour le touriste (pour des visites au clair de lune, par exemple). Mais le temps, la nature - et l’entropie - ont fait leur chemin. L’oeuvre a changé, et c’est aussi une clé de l’art monumental de Smithson. Le débat est ouvert, tel que l’abordent diversement les textes des autres pages de la rubrique.

Evocation par le journaliste Ray Boren (Deseret Morning News) du film Spiral Jetty tourné lors de la construction de l’oeuvre en 1970

Spiral Jetty, le film (un essai de Smithson porte ce même titre) commence avec des vues de cartes : pièces d’un atlas balançant au gré du vent ; une description du lac Bonneville, l’ancienne mer intérieure dont le Grand Lac Salé est un vestige. Smithson montre un empilage de livres: Le Monde Perdu d’Arthur Conan Doyle ; Dédales et labyrinthes ; des textes scientifiques concernant les nébuleuses ; Le Jour du Dinosaure et Sédimentation.

Puis, assez rapidement dans son commentaire, il évoque les spirales : la vieille légende rapportant que le Grand Lac Salé était relié par un tourbillon à l’Océan Pacifique ; la spirale d’étoiles qui constitue une nébuleuse ; le fait qu’accumuler des cristaux de sel tend naturellement à créer des spirales.

Le film le montre jalonnant la spirale avec des bouts de bois dans l’eau rose très basse - pour le Grand Lac Salé, le niveau était encore plus bas en 1970 qu’il l’est à présent. Puis un camion commence à déverser dans l’eau les rocs gris-noir et la terre, prélevés du site, dans des va-et-vient répétés avec ses lourdes charges. C’est alors qu’un bulldozer déplace et tasse les matériaux sur place.

Ensuite, l’artiste et son équipe de tournage balayent au-dessus et autour de la spirale en hélicoptère, détaillant ses trois gigantesques boucles et jouant avec les scintillements du soleil. Enfin, Smithson, devant la caméra, gambade autour des rochers et le long de la jetée jusqu’au centre.

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